vendredi 9 janvier 2009

Confidences de chauffeur de ministre

12 disciples…parle-menteurs !

C’était vraiment l’autre face de la médaille! C’était tout à fait l’envers : notre bailleur de parcelle, l’honorable parle-menteur avait complètement changé ! Alors qu’il nous a arnaqués, nous ses locataires, pendant toutes les fêtes de fin d’année, le voilà soudain épris d’une générosité sans pareil tout au début de l’année 2009, comme pour compenser sa pingrerie légendaire. Au point que j’ai dû, malgré moi, renoncer à bon nombre d’invitations de mon patron, le Ministre des Affaires stratégiques (à prononcer avec respect...). Donc, depuis la fin des fêtes, notre bailleur multiplie des largesses. Les premiers jours de janvier, notre bailleur a distribué porte après porte des sacs de riz, des sacs de fufu et des boîtes de conserves pour testicules de chauves-souris. Et malgré la clôture des ambiances de fin d’année, la majorité des locataires ont rempilé dans de nouvelles cuites. D’autant que, dans un deuxième temps, notre bailleur a commandé des casiers de bière et, de nouveau, les a répartis de porte à porte. Seule ma femme, on ne sait pourquoi, a résisté à toutes ces tentations de générosités. « Générosités suspectes », s’est-t-elle indignée. D’après ma femme, notre bailleur-parle-menteur devenu un superbe flambeur devant l’Eternel, ne pouvait qu’avoir signé des pactes sorciers avec des mamiwatas ou des boas cracheurs d’argent. Toujours d’après ma femme, cet argent distribué à profusion ne pouvait être que du « moyeke », c’est-à-dire de l’argent de « saleté ». J’ai eu beau signifier à ma femme que l’argent n’a pas d’odeur, que l’argent n’est qu’un bon serviteur, sans plus; que l’argent n’a jamais acheté ni l’honneur, ni l’amour, ni l’âme, wapi! Ma chère femme n’en démordait pas : pour elle, l’argent-là de ce bailleur-là ne pouvait provenir que d’un dangereux « occultiste» envoûteur, et apprivoiseur de boas vomisseurs de faux dollars.

En attendant, les locataires avaient prolongé les ambianceries, les beuveries, les cuiteries, les débaucheries. Et, point culminant de cette débaucherie parle-menteuse, notre bailleur a réquisitionné notre nganda-bistrot du quartier et, au cours d’une soirée mémorable, a offert une tournée générale à tous les ambianceurs présents. Ah! Nous nous en souviendrons longtemps de cette fameuse soirée, nous les locataires: ngwasuma à gogo, Tonton Skol à gogo, testicules de chauves-souris à gogo, ambiance à gogo! D’ailleurs, au comble de l’ambiance, pris au jeu lui-même (et certainement pris dans la cuite !) notre bailleur-parle-menteur s’est mis à se trémousser au milieu de la piste de danse comme un tourniquet, la tête en bas les jambes en l’air. Le spectacle était si inédit que la foule des badauds du quartier s’est ruée vers le nganda-bistrot, surtout la cohorte des « londonniennes» et des autres filles de joie. Du coup, les quelques épouses des locataires présentes à cette bamboula folle ont brutalement quitté les lieux, en signe de protestation contre l’invasion des prostituées. Les maris eux, ne se sont pas fait prier, et ont continué de plus belle la fiesta. Bien au contraire, tous se sont jetés à bras raccourcis et avec une gourmandise suspecte sur les « londonniennes» délurées. Bien entendu la soirée s’est prolongée ainsi jusqu’aux petites heures ...

Or, mauvaise surprise à l’aube : alors que nous étions tous K.O de la bière, de la bouffe, des nanas et de la danse, y compris notre honorable parle-menteur-bailleur, nous avons été surpris par l’irruption brutale et musclée de la police, avec à la tête un Officier de Police Judiciaire des parquets. Ce dernier tenait en mains un mandat d’arrêt au nom ... notre bailleur. Renseignements pris, notre honorable bailleur figurait sur une liste de 12 parle­menteurs bénévoleurs et indélicats qui avaient touché des matabiches et autres pots-de-vin de la part de la société E.S.C.R.O .C (Etablissements Sodo-Culturels des Réalisations et des Opérations Charitables). L’ESCROC en question souhaitait ainsi voir rehausser ses prévisions budgétaires alors en examen au parlement, spécialement la rubrique des interventions financières du gouvernement. Notre bailleur de parcelle avec les 12 disciples indisciplinés ont donc contribué à gonfler exagérément les recettes de la fameuse société ESCROC (Etablissements Sodo-Culturels des Réalisations et des Opérations Charitables).

... Mais une autre surprise de taille m’attendait, moi personnellement, quand je suis rentré au bercail, ivre comme un malafoutier. Ma femme avait bloqué notre porte d’entrée, sans doute en signe d’embargo, et avait même poussé le culot jusqu’à inscrire à la craie blanche sur cette porte: « Interdit isi les gens, les agents et les argens sales! ». Cette mémère avait en plus gribouillé tout ça dans une sale langue française...

YOKA Lye
andreyoka@yahoo.fr

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